Il y a des samedis où l’on travaille plus fort à la maison que toute la semaine au travail…
Ce matin, les devoirs avec les enfants ont été assez exigeants. Ils en ont beaucoup, et je reste sobre quand je dis «beaucoup». En plus, FX a de la difficulté avec les fractions. Pour tout vous dire, ça ne rentre carrément pas! Comme son prof n’a pas réussi à lui expliquer cette notion clairement et comme j’ai volontairement évité de choisir le métier d’enseignant, je n’y parviendrai certainement pas mieux de mon côté. Mais bon, il faut ce qu’il faut!
Alors, après le marathon des devoirs, l’heure du dîner, le ramassage de ce qui traîne, le lavage et toutes les activités de l’après-midi, je décide de prendre une pause. Mais Crème anglaise me désigne l’horloge, et nos quatre requins qui tournent autour de la table. Il est 17h 30, ils sont affamés. Au diable la pause! Je commence le souper.
Aussitôt que je dépose un bol de légumes ou de biscottes sur la table et que je tourne le dos, j’entends «beding bedang, scrountche, scrountche, beding bedang». Ils se bousculent , s’empiffrent, puis déguerpissent avant que je puisse leur crier: «On ne touche pas, c’est pour souper!»
Finalement, nous nous asseyons devant un bon repas. Un jambon braisé à la root beer, accompagné de lentilles sautées avec maïs et pois verts parfumés aux herbes fraîches.
– C’est quoi, ça? demande FX.
– Beurk!, proteste Optimus.
– I don’t like it, déclare Professeur Tournesol.
– Ouin! Maman nous sert pas ça, elle! renchérit ma fille.
L’heure du souper se déroule aussi bien que le laissaient présager leurs commentaires! Après de longues minutes de négociation et des «c’est bon pour la santé», rien ne va plus. Ils rouspètent et se chamaillent. C’est un vrai tintamarre.
– Ok, je vais aller m’asseoir un peu. Je viendrai t’aider à ramasser plus tard, dis-je en me levant de table.
– No, no, no. On ramasse maintenant et on se repose ensuite, insiste Crème anglaise.
– Pas question! Je prends une pause.
– Je peux sortir de table?, demande FX.
– Je parle avec Crème anglaise, attends. Je ne ramasse pas maintenant. Là, je suis fatigué.
– Je peux sortir de table?
– Pascal! You help first, rest later!
– Je peux sortir de table?
- HEILLE ÇA SUFFIT! J’PARLE
Je crois que le toit de la maison a levé l’espace d’un instant. Mon «Heille, ça suffit!» était de la force de quatre Pavarotti qui se cognent le petit orteil en même temps.
Mon fils se lève et monte dans sa chambre. Il demandait simplement à sortir de table quand tous les autres étaient partis sans le demander. Lui, il avait suivi la règle.
Je respire un bon coup. J’emprunte les escaliers et rejoins mon fils.
– FX, je… je suis désolé. Je n’avais pas à crier.Tu as bien fait, tantôt. J’ai oublié d’être un papa un instant.
– … J’accepte tes excuses, papa. Si tu risques de l’oublier, tu peux l’écrire dans ton Ipad. Il y a un aide-mémoire dedans.
– Oui… c’est une bonne idée. On se fait un câlin?
– Oui… Et… ils étaient pas si pire que ça, ton jambon et tes légumes.
– Ah oui? Ça tombe bien, je vais te faire un sandwich avec ce qui reste.
– Euh… ben… non merci. Une fois par année, c’est assez pour moi.
Pascal Lachapelle
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